En volant au secours d'un collиgue poignardй а la gorge -au pйril de sa propre vie -un chauffeur de taxi de Montrйal pиre de cinq enfants est devenu bien malgrй lui, hier, un vйritable hйros.

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Il a lui-mкme frфlй la mort quand les trois crapules qu'il venait d'intercepter se sont ruйes sur lui et l'ont poignardй а son tour.

Mario Chйrйmond, qui aura 30 ans le 4 avril, circulait dans le sud-ouest de Montrйal dans son taxi, vers midi, lorsqu'a retenti sur les ondes radio de la compagnie Diamond le code de dйtresse annonзant qu'un chauffeur йtait en grand danger.

А cet instant prйcis, un couple de Jamaпcains venait de taillader un chauffeur pour quelques dollars, croit-on, coin Atwater et Notre-Dame.

«Quand un code «13» est lancй, зa veut dire que зa va mal! Et si on est dans les environs, on ne se pose pas de question: on va porter secours а nos collиgues», a confiй au Journal de Montrйal M. Chйrйmond, le plus humblement du monde.

Alors, il a foncй, comme d'autres. Mais il est arrivй si vite qu'il s'est retrouvй face aux trois suspects.

«Celui qui avait un couteau a couru vers moi. Un autre a essayй de voler mon auto mais n'a pas rйussi. Je suis tombй au sol et les trois m'ont battu et poignardй. Mon manteau montre plusieurs traces de coups de couteau. Heureusement, seulement deux m'ont transpercй, au niveau des cфtes.»

SAUVЙ А SON TOUR

Il aurait pu y laisser sa peau si les suspects, entendant les sirиnes de police, n'avaient tout а coup abandonnй leurs victimes et quittй la scиne en courant.

Ils ont laissй tomber les clйs d'auto et l'argent du vol et ils ont crevй les pneus de quelques voitures pour protйger leur fuite.

Tйmoignant de la violence de l'agression, on dйcouvrait plus tard, sur la scиne du crime, deux traces de mains dans la fenкtre de l'un des vйhicules, du sang et mкme un ongle sur la chaussйe.

Les policiers de Montrйal ont йtй si prompts а intervenir qu'ils ont rйussi а intercepter l'un des suspects.

BOURRЙ DE MORPHINE

Quand il est sorti de l'hфpital en soirйe, «cousu» et bourrй de morphine, Mario Chйrйmond a eu pour premier rйflexe de retourner sur la scиne du crime. Puis il est rentrй а la maison auprиs de sa femme et de ses tout jeunes enfants.

«Je n'arrive pas а comprendre que des gens volent, disait-il. Les chauffeurs de taxi ne font pas beaucoup d'argent. Je travaille 12 heures par jour du lundi au jeudi; moins les autres jours. Il faut bien que je nourrisse ma famille.»

«Des fois, on arrive а amasser 60 $ ou 70 $; mais souvent, comme hier, j'ai fait а peine 7 $ entre 5 et 7h30 le matin.»

Pourtant, il n'hйsite pas а se contenter de 5 $ pour une course qui en vaudrait 7 $. «Je peux comprendre, parfois, quelqu'un qui manque d'argent. Tout le monde est cassй, ces temps-ci. Mais le vol, зa je n'accepte pas.»

SON COLLИGUE DANS LE COMA

A-t-il eu le temps d'avoir peur, lors de l'agression? «Je n'ai jamais eu peur de ma vie. La seule chose dont j'aurais peur serait de faire face а la police si je prenais а d'autres ce qui ne m'appartient pas», dit-il.

Hier soir, il craignait tout de mкme pour la vie de son collиgue, toujours dans le coma.